GNAWAS, INVITATION A LA TRANSE
Il faut avoir éprouvé, un jour, l’étourdissement physique, psychique et mystique d’une cérémonie gnawa pour appréhender la force de cette culture séculaire. Remontant au moins au XVIe siècle, perpétuée au Maroc par les descendants d’anciens esclaves venus d’Afrique subsaharienne, cette tradition est inscrite au patrimoine immatériel de l’Unesco depuis 2019.
Le 18e festival Arabesques lui consacre une place prépondérante de sa programmation, attentif à son histoire autant qu’à son actualité. Le Gnawa est avant tout une musique confrérique soufie, associée à un rituel de transe où le profane se mêle au sacré. Sous l’impulsion du maître (mâalem), le luth à trois cordes (guembri), les crotales métalliques (qraqeb) et les tambours (tbel) y accompagnent des paroles invoquant les ancêtres et les esprits. Une musique bien vivante ! Des pointures du rock ou du jazz (Robert Plant et Jimmy Page, Bill Laswell, Randy Weston) s’y sont frottés. Surtout, au Maroc, les pratiquants se rajeunissent et le nombre de groupes s’accroit, sous l’influence notamment du Festival Gnaoua et Musiques du Monde d’Essaouira, fondé en 1997, au cours duquel des stars internationales et des groupes traditionnels se rencontrent devant des dizaines de milliers de spectateurs.
Le festival Arabesques offre cette année une carte blanche à son prestigieux homologue en accueillant sa grande création 2023, une fusion électrique qui
associe Maâlem Hamid El Kasri, Karim Ziad, Torsten de Winkel, Mustapha Antari et Mehdi Chaïd. Cet événement est complété par un focus passionnant sur la scène féminine incarnée par Asmâa Hamzaoui & Bnat Timbouctou et par la « rockeuse du désert », Hasna El Becharia. On entendra également l’expression du Gnawa sous ses formes actuelles, de Majid Bekkas au duo Aziz Sahmaoui & Eric Longsworth, en passant par Gnawa Diffusion venu présenter son nouvel album. Les visiteurs du festival Arabesques sont prévenus : cette édition 2023 est une invitation à la transe.
Eric Delhaye
04 99 77 00 17